Article d’ans l’Express par Lucie De La Héronnière, publié le
La plupart des saumons dégustés en France ont été pêchés ou élevés en Norvège ou en Écosse. Pourtant, une petite filière hexagonale existe. Que vaut-elle? Faut-il acheter du saumon français?
À l’approche des repas festifs de décembre, on peut donc s’interroger: que ce soit du saumon fumé ou du saumon frais, faut-il privilégier le saumon “made in France”?
En France, 68% des consommateurs jugent que le saumon fumé est un produit “incontournable” des fêtes de fin d’année, d’après une enquête ETF (Entreprises du traiteur frais)/CSA menée en octobre 2017. 80% des saumons fumés vendus dans le pays ont été transformés dans des ateliers de fumage français, par 28 PME (Petites et moyennes entreprises). Ces saumons proviennent de Norvège (66%), d’Écosse (23%), d’Alaska (6%), d’Irlande (4%) ou autres (1%). Dans cette dernière catégorie, on trouve les saumons issus de la pêche et de l’élevage français. La filière hexagonale est petite: il existe seulement deux fermes d’élevage, et un type de saumon sauvage, le saumon de l’Adour.
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En Normandie également, l’entreprise Saumon de France est une ferme aquacole située en mer, dans la rade de Cherbourg. “Nous bénéficions des plus forts courants d’Europe, ce qui met les poissons en situation de nage. Notre saumon est donc peu gras, avec un taux de graisse proche de celui du saumon sauvage. En même temps, nos installations sont protégées par la digue Vauban”, explique Pascal Goumain, président directeur général.
Dans cette ferme marine, on insiste sur le respect du bien-être animal. Les 300 tonnes de saumons produits chaque année ont ainsi un “espace optimal” pour nager. “En Norvège ou en Écosse, il y a d’énormes élevages, dans des sites protégés fermés. Il y a peu de renouvellement des eaux. La concentration des animaux peut attirer des parasites et donc un traitement avec des pesticides”, précise Pascal Goumain.
“Nous avons récemment racheté la fumaison Le Saumonier de Cherbourg. Nous fumons nous-mêmes 10% de nos volumes”, ajoute-t-il. C’est également un saumon apprécié par les professionnels, comme Thierry Marx, ou Guillaume Gomez, le chef de l’Élysée.
Du saumon durable?
Vu la taille de la filière, il est plutôt facile d’avoir une traçabilité et des garanties. […] Chez Saumon de France, on garantit une alimentation sans OGM, des faibles densités d’élevage, un “suivi environnemental” pour limiter l’impact de la ferme…
En outre, un saumon issu d’eaux françaises réduit forcément le bilan carbone de son voyage jusqu’à votre assiette, tout en assurant une fraîcheur des poissons. Pascal Goumain, de Saumon de France, précise: “On pêche le matin, les premiers départs se font l’après-midi.” Il est d’ailleurs possible d’acheter du saumon en vente directe, au magasin d’usine ou sur le site Internet, ou bien chez des professionnels.
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Des prix élevés?
Voilà ce qu’il en est pour la vente directe sur les sites Web des éleveurs de saumon: frais, le saumon de France de Cherbourg coûte 30 euros le kilo, tandis que sa version fumée est à 89 euros le kilo. Du côté d’Isigny, le frais est à 38 euros le kilo, et les tranches de saumon fumé à 85 euros le kilo.
À titre de comparaison -uniquement financière-, un pavé de saumon frais en barquette acheté au supermarché coûte de 30 à 40 euros le kilo. Tandis qu’on compte pour un saumon fumé “haut de gamme” de grande distribution environ de 60 à 80 euros le kilo.
Quid du saumon de l’Adour? Qui dit produit de luxe, dit tarif élevé. “Quand c’est la saison, nous avons du saumon de l’Adour frais. C’est un produit rare. Le prix minimum en boutique, c’est 150 euros le kilo”, décrypte Arnaud Vanhamme. En version fumée, la Maison Barthouil le vend sur son site à 270 euros le kilo.
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Au final, “acheter du saumon français, c’est la garantie d’une bonne qualité. Car c’est une petite filière, avec un cahier des charges drastique, une politique de qualité”, explique Arnaud Vanhamme. Mais, pour lui, cela ne signifie pas pour autant qu’on ne trouve pas d’excellents saumons ailleurs. “En Norvège, il y a des élevages intensifs, et il y a aussi de super saumons. Et c’est pareil en Écosse”, poursuit le poissonnier, qui a en ce moment sur son étal un saumon Label Rouge écossais. En insistant sur la grande importance de la fraîcheur du poisson, il conclut: “Ma référence, ce sont mes mains et mon oeil. L’important, c’est de faire confiance à son commerçant.”